30 mars 2013

DANTESQUE

 
                                                                                                Ary Scheffer - Fantômes de Francesca et Paolo apparaissant à Dante & Virgile, 1835


L'ange du bizarre - le romantisme noir de Goya à Max Ernst intrigue. L'exposition piste une influence artistique dark-dark-d'art étalée sur près de 3 siècles: le romantisme noir, qui épingle esprits, satanisme, torture, luxure, sorcellerie et autres pulsions animales ou destructrices. Vraiment charmant.
Car le Printemps avec son lot de fleurs en bourgeon -hein?-, de piafs qui gazouillent -quoi?- et de terrasses ensoleillées -you wish- nous ferait presque oublier nos racines scélérates de mammifères cannibales et cruels. Heureusement que le Musée d'Orsay est là pour nous mettre sous le nez nos plus vilains vices.
Tous les arts se rencontrent autour de la peur et de l'horreur: peinture, sculpture, arts graphiques et cinéma. Si les premières salles sont pleines de promesses niveau frissons et troubles en tout genre; la deuxième partie de l'expo, plus contemporaine déçoit un peu. La subversion retranscrite chez les dadaïstes et autres surréalistes apparaît un peu fade et lisse face aux sublimes œuvres perverses de Füssli ou de Scheffer (meurtres, adultères et cauchemars au choix). Par contre, voir ou revoir de courts extraits de Faust, de Frankenstein ou de Dracula est un régal: kitsch au possible et terrifiant sur les bords; on regrette que l'ensemble des films ne soient pas projetés, au crépuscule, dans un musée d'Orsay vide et hanté...
Cette expo vaut le détour aussi grâce à la présentation de nombreuses eaux-fortes de Goya, remarquables; et pour l'esquisse du Radeau de la Méduse par Géricault; mini format pour maxi effet.
Amateurs de mystère et de macabre.. hâtez-vous!

> jusqu'au 9 juin, Musée d'Orsay


24 mars 2013

KRUTA*


De passage a Moscou, j'ai découvert un lieu détonant, ouvert il y a 1 mois, et dont les moscovites peuvent être fiers. Le Gogol center est -s'il fallait trouver un pendant parisien- une sorte de 104 en format compact, un 10,4 donc. De la vieille pierre revisitée; mais une âme architecturale intacte; un esprit convivial où souffle la brise du numérique, un espace expo orienté écrans & co; une librairie indé où chiner du grand tout et du petit rien; et un bar où il fait bon vivre / boire / picorer / wifier / se rencontrer.. Mais c'est avant tout un théâtre, avec une programmation très actuelle théâtre-danse-musique et ça promet vraiment. 
Ce soir là, Anna Abelikhina danse avec Ivan Estegneev "pièce à vivre", duo mêlant chorégraphie et performances multimédias in vivo. Inclassable mais bigrement efficace, c'est le couple qui est observé, détaillé, mimé et disséqué par les deux danseurs. Un couple qui lutte, qui se construit dans le quotidien; face à un quotidien qui... les détruit? Au second plan, une cuisine, image numérique glaçante, leur sert de décor. Peu à peu le jeu s'engage entre les personnages et leur monde virtuel/réel. Le couple, sujet éternel, est abordé ici sans parole, et à mon sens cela gagne -en sens- justement. Aucun mot, mais des sensations, des huis-clos, des écoeurements d'âme, des doutes, des émotions, des heurts. Un corps à corps, très coeur à coeur, qui fonctionne comme une mise en transe; la programmation informatique expérimentale y est un outil bien maîtrisé et pas cliché au service de la chorégraphie de la russe Anna Abelikhina. Artiste associée aux Ateliers de Paris - Carolyn Carslon, vous pourrez sans nul doute bientôt l'applaudir a Paris / Cartoucherie de Vincennes. 

> june events à la cartoucherie
* semble exprimer en russe la satisfaction pleine et entière 

4 mars 2013

INSTANTANE


                                                                                                                    Photomontage, 1985 © 2000 Fondation Jean-Pascal Imsand/ProLitteris 

Qui connait le photographe suisse Jean-Pascal Imsand ? Franchement ?
Bon. On est d’accord. Dans le milieu photographique, la notoriété « grand public » semble suivre ses propres lois aritmé[dia]thique.
[donc]
Les clichés d’Imsand ne le sont pas, clichés ; et ça c’est plaisant.
Uniquement en noir & blanc pour cette exposition ; ça c’est cadeau.
Photographe & fils de photographe, Dolto se régalerait. Suicidé à 34 ans [mon âge, glups] ; ça renforce le mythe.
Imsand, un homme réservé, tourmenté. Et doué! Grand prix européen de la photographie – Arles 1988 ; pour ses assemblages oniriques entre inquiétude et poésie. Les images de ces photomontages sont bluffantes; et d’une technique irréprochable (due à sa formation d’imprimeur-lithographe).
Amoureux aussi. Il ne cessera de capturer sa femme, son inspiration, Sabina... Dans ses photos, elle apparait, disparait, pas toujours reconnaissable. Sa Gala, en somme.
Imsand photographie une brocante, ses passants, il capte l’humeur de sa ville Lausanne, & chaque jour immortalise la même rue… Extrêmement varié, son travail étonne par sa rigueur et la richesse de ses partis pris.
Cette exposition vaut aussi le détour pour découvrir la Maison de la Photographie Robert Doisneau, écrin de choix à la programmation pointue et revigorante.

> jusqu'au 12 mai à la Maison Doisneau